Chaque jour nous apprenons, nous acquérons de nouvelles connaissances, que nous soyons collégiens, lycéens, étudiants ou professionnels. Mais comment fonctionne l’apprentissage, et quels sont les leviers pour mieux retenir… ou aider ses enfants à le faire ? Stanislas Dehaene, psychologue cognitiviste et neuroscientifique nous donne quelques clés dans une interview à l’occasion de la sortie de son livre Apprendre (Odile Jacob).
Apprendre est le propre de l’Homme : aucune autre espèce n’apprend aussi vite que nous. Mais qu’est-ce que c’est apprendre concrètement ? Comment est-ce que cela se passe physiologiquement ?
Le mot apprendre a la même racine qu’appréhender ; cela signifie « restituer dans mon cerveau ce que je capte dans le monde extérieur », c’est à dire internaliser / construire dans notre tête une image du monde extérieur. Par exemple, quand on rêve, notre cerveau recrée pendant le sommeil un monde complet à partir d’éléments extérieurs qu’il a internalisé.
Physiologiquement, dans notre cerveau, l’apprentissage se traduit par la création et la destruction de millions de connexions synaptiques en fonction des stimuli auxquels est confronté notre cerveau, des expériences qu’il vit. Cette capacité à créer et détruire des connexions s’appelle la plasticité. C’est ce qui nous permet d’apprendre énormément de connaissances dans des domaines très variés.
La période de 15 à 17 ans constitue l’apogée de cette plasticité. Passée cette période, il devient de plus en plus dur d’apprendre, par exemple les langues étrangères. C’est pour cela qu’il est essentiel d’apprendre les langues tôt. Cela vaut pour la langue maternelle à laquelle il est bon d’exposer le bébé fortement avant l’âge d’un an : c’est à cette période que l’on acquiert les fondamentaux qui nous permettent de comprendre et de parler notre langue. Par exemple, les Japonais ne font pas la différence entre la lettre « L » et la lettre « R ». Ce genre de d’incapacité est fixée dès la première année de vie. De manière plus plus générale, les voyelles se fixent vers 6 mois et les consonnes vers 12 mois, d’où l’importance de parler tôt au bébé.
Il y a 4 piliers sur lesquels repose l’apprentissage :
1. L’attention
Attention et connaissance
Sans attention, il n’y a pas de mise en place profonde des connaissances dans le cerveau. Et déconstruisons un mythe : on ne peut pas être attentif à deux choses en même temps : il faut que mon attention soit fixée sur un seul objet (l’attention est comme une porte d’entrée vers le cerveau). Moi, adulte, en connaissant la réponse, je m’étonne que mon enfant ne voie pas l’événement recherché.
Essayez par exemple de compter le nombre de passes que fait l’équipe blanche au basket dans cette vidéo. Cette expérience a été menée par deux chercheurs d’Harvard et vous surprendra certainement.
Comment favoriser l’attention ?
Vous pouvez favoriser la concentration de votre enfant en ne surchargeant pas sa chambre ou son bureau de décoration ou objets. Il faut éviter les écrans trop stimulant (jeux rapides, vidéos etc.).
2. Être actif (bouillonner, faire des hypothèses)
L’erreur est importante pour apprendre : il faut se tromper pour apprendre : le cerveau apprend en faisant des prévisions puis en comparant ce qu’il s’est passé avec la prévision.
Le point important est d’Ă©viter de toujours lier erreur et sanction : malheureusement cette dernière accompagne souvent la première. Voltaire disait « Aime la vĂ©ritĂ© mais pardonne l’erreur ». En sanctionnant une erreur, l’enfant voudra Ă©viter l’erreur, et donc essayera moins de choses ; il sera inhibĂ©.
En revanche, signaler l’erreur avec bienveillance, sans la sanctionner est productif. L’enfant saura ce qu’il doit Ă©viter de faire mais n’aura pas peur de se tromper Ă nouveau sur d’autres hypothèses.
3. Consolider le savoir
Les deux points clés de la consolidation du savoir sont la répétition des apprentissages et le sommeil : le cerveau répète les apprentissages de la journée pendant la nuit. L’Académie de Pédiatrie a mené des recherches : les adolescents ont du mal à aller se coucher tôt et à se lever tôt car les rythmes de sommeil se décalent chez l’adolescent (cela en dehors des biais qui accentuent ce phénomène : exposition aux écrans, réseaux sociaux etc.). Quand on décale le début de l’école d’une heure chez les adolescents, on constate de meilleurs résultats. Tant que l’Éducation Nationale ne mettre pas cela en place, il va falloir se coucher le plus tôt possible. ?
4. La curiosité
La curiositĂ©, c’est vouloir savoir. Elle a un fort impact sur l’apprentissage ; c’est elle qui gĂ©nère de la dopamine. Le circuit de la dopamine est très ancien : c’est celui qui nous pousse Ă aller chercher de la nourriture par exemple. Mais chez l’humain ce circuit est allĂ© très loin : on peut se passionner pour l’astronomie, pour la dĂ©couverte et le savoir en soi, mĂŞme s’il n’a pas d’intĂ©rĂŞt pratique en soi (comme la survie pour l’alimentation).
Un cerveau bilingue résiste mieux à la maladie d’Alzheimer. Le bilinguisme permet un doublement des réseaux neuronaux, ce qui retarde l’arrivée des premiers symptômes.
Voici les conseils de Stanislas Dehaene pour être plus performant quand on apprend. Vous pouvez les retrouver dans une courte vidéo ici.
Apprendre Ă faire attention :
Ce que permet l’apprentissage de la musique par exemple.
RĂ©partir l’apprentissage dans le temps :
Si j’ai deux heures disponibles pour apprendre, il vaut mieux accorder 10 minutes par jour pendant 8 jours qu’une séance de 2 heures en un seul coup.
Offrir un environnement enrichi pour les enfants :
Et notamment du langage : offrez lui un vocabulaire riche, de quoi le stimuler.
Bien calibrer ce que l’on donne Ă apprendre :
On n’arrive pas Ă apprendre ce que l’on connaĂ®t dĂ©jĂ ou ce qui est trop difficile Ă apprendre. Naturellement on est attirĂ© par ce qu’on est capables d’apprendre.
Dormir est essentiel :
C’est ce qui permet la consolidation, sans rien faire. Ce n’est pas du temps perdu, c’est de l’apprentissage !
Captiver l’attention des enfants:
Ne pas faire de cours magistral : alterner période d’enseignement et de questionnement : poser des questions, laisser l’enfant répondre et surtout… le laisser faire des erreurs : soyez patients !
Ne pas hésiter à répéter :
C’est la rĂ©pĂ©tition espacĂ©e dans le temps qui amĂ©liore l’apprentissage.
À voir également : Apprendre par cœur, quelques astuces
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